-
La vie secrète des animaux ≡ Peter Wohlleben
La vie secrète des animaux
Peter Wohlleben
Les Arènes
2018
Peter Wohlleben, qui gère une forêt écologique en Allemagne, nous livre quelques faits et études sur le comportement des animaux et des insectes. Éprouvent-ils de la compassion ? Savent-ils mentir ? Un ouvrage instructif, composé de courts chapitres à picorer, comme une invitation à porter un regard antispéciste sur ceux que la société méprise et exploite.
« Nous ne saurons jamais si les animaux ressentent la peur, le chagrin, la joie ou le bonheur de la même manière que nous1 ».
À travers une quarantaine de très courts chapitres, Peter Wohlleben met en avant les comportements et capacités de certaines espèces animales, des abeilles aux ours, en passant par les pigeons, et même les blobs ! Les animaux éprouvent-ils de l’amour ou le chagrin du deuil ? Peuvent-ils voler ou mentir, avoir honte ou regretter, se souvenir ou rêver ?
C’est ainsi qu’on apprend que les sangliers savent reconnaître de nombreux membres de leur famille sur plusieurs générations, que les coqs peuvent manipuler les poules pour leur sauter dessus, que les grives litornes se défendent en groupe contre les attaques de la corneille noire, que le renard se fait passer pour mort pour gober le corvidé qui s’approche…
« S’il se met à faire très froid, les insectes [les abeilles] se blottissent les uns contre les autres pour former une grappe. C’est en son centre qu’il fait le plus chaud : c’est l’endroit le plus sûr ‒ et c’est évidemment là que doit se trouver la reine. Qu’en est-il des autres abeilles, celles qui se trouvent à la périphérie de la grappe ? Quand il fait moins de 10°C à l’extérieur, elles mourraient de froid en quelques heures. Alors, des congénères de l’intérieur viennent aimablement les remplacer, pour qu’elles puissent à leur tour aller se réchauffer au cœur de la grappe grouillante2. »
Mon avis
La vie secrète des animaux est un ouvrage passionnant qui se lit petit à petit, sur les temps de trajet, dans une salle d’attente, comme une lente imprégnation du monde animal. J’ai lu avec plaisir ces études scientifiques et récits éthologiques, même si je regrette que l’auteur s’oppose assez mollement à l’élevage intensif et à la chasse.
L’exploitation animale est aux fondements de la société capitaliste, patriarcale, colonialiste, validiste et écocidaire, comme je l’ai montré dans une dizaine de chroniques sur Bibliolingus. Avec la déforestation et la pollution des eaux, des sols et de l’air, le nombre d’animaux non domestiqués et leurs habitats ne cessent de se réduire.
Toutes les citations sur Instagram
« La nature n’est pas un meuble à casiers. Il n’existe pas d’espèces fondamentalement bonnes ou mauvaises, comme nous l’avons déjà vu à propos de l’écureuil. il est cependant bien plus facile à ce dernier qu’à la tique d’éveiller notre compassion ou, au moins, notre intérêt. Et pourtant, cette minuscule créature repoussante a, elle aussi, un ressenti, qu’il est possible de prouver empiriquement, du moins en ce qui concerne les sensations toutes simples comme la faim3. »
Il s’agit de faire un pas de côté le temps de cette lecture, d’arrêter de voir les animaux de notre point de vue, de les catégoriser selon leur degré d’« utilité » ou d’« intelligence ». Il s’agit de les observer et de tenter de les comprendre pour ce qu’ils sont : des vies sensibles et sentientes, qui méritent d’être vécues et respectées. Les animaux ne sont pas « juste des machines agissant, si ce n’est sur simple pression d’un bouton, sous la seule pression des hormones4 ».
Le point fort de cet ouvrage, c’est de montrer que l’exploitation animale repose précisément sur le déni du droit à vivre des animaux. Selon l’association L214 que je soutiens depuis des années, chaque jour en France, 3,2 millions d’animaux d’élevage sont tués. Par ailleurs, d'après l’ONU, l’élevage est responsable de 12 % des émissions humaines de gaz à effet de serre, sans parler des maladies liées à la consommation de viande (cancer, maladie cardio-vasculaire).
Certain·es parmi vous le savent, je suis végane depuis 2017, mais le véganisme n’est que la face la plus visible de l’antispécisme. J’aimerais que ce livre soit un déclic pour toutes les personnes qui continuent à manger des animaux (même élevés en plein air), à consommer du lait et du miel, à porter du cuir et de la laine, à aller au zoo, à acheter des animaux de race, ou à pratiquer la chasse. Par petits pas, individuels et collectifs, on peut avancer vers un monde plus respectueux de tous et toutes, mais aussi plus sain et écologique.
Lisez aussi
Essais
Nora Bouazzouni Faiminisme. Quand le spécisme passe à table
Aymeric Caron Antispéciste
Martin Page Les animaux ne sont pas comestibles
Jonathan Safran Foer Faut-il manger les animaux ?
Peter Singer La Libération animale
Jessica Serra Dans la tête d’un chat
Ophélie Véron Planète végane
Littérature
Upton Sinclair La Jungle
Jeunesse
Ruby Roth Ne nous mangez pas !
Pour ne pas manquer les prochaines chroniques, inscrivez-vous à la newsletter !
Suivez-moi sur Instagram !
La vie secrète des animaux
Traduit de l’allemand par Lise Deschamps
Peter Wohlleben
Les Arènes
2018
388 pages
20,90 €
1. Page 245. -2. Page 81. 3- Pages 76-77. -4. Page 253.
Tags : Peter Wohlleben, la vie secrète des animaux, livre éthologie, éthologie
-
Commentaires
Un livre peut changer les choses en cette matière puisque c'est un livre qui m'a décidée à ne plus manger de viande du tout (Défaite des maîtres et possesseurs de Vincent Message). Par contre, je tue toujours les tiques que je trouve sur moi ou sur mon chat... et je suis sans pitié contre les puces, les poux, les araignées, les mouches...
Coucou !! Hahaha !! Idem pour les moustiques, je ne les épargne pas car ma peau sur-réagit !
Pour moi aussi, les livres m'ont poussée vers le véganisme (je note celui de Vincent Message au passage), cela dit, je dirais que ça représente un tiers : le deuxième tiers c'est une amie qui m'a montré au quotidien comment elle se nourrissait, et enfin le dernier tiers c'est mon chat... Et ce sera l'objet d'une chronique d'ici à la fin de l'année ;)