• À la recherche de la bibliodiversité

    C’est parti pour une nouvelle rentrée littéraire ! La course pour les prix a démarré, les articles des journalistes et des blogueurs pleuvent, et les éditeurs indépendants doivent se battre pour exister.

    Depuis la naissance de Bibliolingus en janvier 2012, je me suis efforcée de présenter un maximum de livres de maisons d’édition indépendantes. À l’heure actuelle, une soixantaine de maisons sont représentées, parmi les centaines existant en France (liste mise à jour chaque année).

    Littérature : 13e note éditions, Anarchasis, Agone, Anacaona, aNTIDATA, Asphalte, Aux Forges de Vulcain, Decrescenzo éditeurs, Hors d'atteinte, Intervalles, La Cheminante, La Différence, L’Arbre vengeur, Le Dilettante, Les Allusifs, Le Tripode, Liana Levi, Mirobole, Monsieur Toussaint Louverture, Naïves, Philippe Picquier, éditions du Revif, Rue des promenades, Serge Safran, Tropismes éditions, Tusitala, Zulma.

    Non fiction : Allary, Agone, Anamosa, Apogée, Au diable vauvert, Bartillat, Binge audio éditions, Charles Léopold Mayer, Éditions du Détour, éditions divergences, Éditions Goutte d’or, Hors d'atteinte, La Dispute, La Ville brûle, Les Éditions Libre, La Fabrique, L’Atelier, L’Échappée, iXe, Le Muscadier, Libertalia, Lignes, Monstrograph, Nouriturfu, Premiers Matins de novembre, Raison d’agir, Rue de l’échiquier, Syllepse, Utopia.

    Illustré : 6 pieds sous terre, La Musardine, Le Passager clandestin, éditions lapin.

    Jeunesse : L’Age d'homme, Yucca.

    Pourquoi valoriser davantage les maisons indépendantes ?

    Tout n’est pas noir et blanc, mais l’indépendance est un gage de qualité, d’originalité et de diversité.

    L’indépendance financière permet aux éditeurs passionnés et proches des lecteurs de conserver leur liberté intellectuelle, sans se soumettre au diktat de la rentabilité. La liberté intellectuelle permet de prendre des risques éditoriaux (parce que leur structure est plus légère), de sortir des sentiers battus, de ne pas publier de « littérature commerciale » (celle qui a les moyens financiers et commerciaux de s’inviter chez le plus grand nombre de lecteurs) ou des essais aux idées dominantes (pour ne parler que de ces secteurs).

    À l’inverse, j’estime que les maisons appartenant aux groupes, dont la réputation est déjà bien faite, n’ont pas tant besoin des blogs pour s’en sortir, puisqu’elles ont avec elles une structure de distribution et de diffusion colossale qui rend possible leur présence dans toutes les librairies françaises. Cette force de frappe commerciale et leurs catalogues forts de noms célèbres leur permettent davantage de faire des best-sellers. Comme la structure des groupes est lourde, ceux-ci ne peuvent pas prendre de risques, ils doivent publier ce qui se vendra à coup sûr. Ils calculent, ils mesurent, ils supputent sur nos goûts et nos impulsions d’achat, à nous, lecteurs. 

    À titre d’exemple, la majeure partie des traductions (de romans) publiées en France sont anglophones. Pourquoi ? Parce que nous, lecteurs, sommes supposés préférer les romans américains et anglais, au détriment d’une multitude de textes issus de toutes les cultures européennes, africaines, asiatiques, sud-américaines. Connaissez-vous beaucoup de romans portugais ? hongrois ? polonais ? Et voilà déjà des pans culturels du monde entier qui nous sont peu accessibles ! Le lectorat est supposé être trop peu intéressé, et en plus les frais de traductions sont élevés. Malgré les contraintes de coût, la littérature étrangère est pourtant encouragée par les maisons indépendantes (soutenues par les subventions du Centre national du livre).

    Or, il y a quelque chose de désagréable dans cette démarche, car moi, j’aimerais plutôt qu’on me propose ce que je n’ai pas l’habitude de lire, ce qui va me surprendre. C’est comme si l’éditeur me disait : « Lis ce livre dont je sais déjà que tu vas l’apprécier, puisqu’il correspond à ce que tu connais déjà. » Le pacte entre lecteur et éditeur se rompt, celui qui permet à l’éditeur de proposer des titres originaux, différents, surprenants, avec la confiance du lecteur. Le véritable rôle de l’éditeur, c’est de nous faire découvrir la diversité et la complexité de la littérature et des idées, pas de nous resservir la recette qui donne des sensations à coup sûr.

    En tant que blogueurs et blogueuses, nous avons le pouvoir de défendre la diversité des goûts. Et par conséquent, je défends l’édition indépendante qui fait la richesse du paysage culturel français. La bibliodiversité, ce sont tous ces éditeurs et éditrices qui l’a font, et qui sont bien plus nombreux·ses que les grands noms que nous connaissons.

    Je m’associe également à des initiatives visant à faire découvrir ces petites maisons. Et puisque c’est déjà la rentrée littéraire, vous pouvez d’ores et déjà vous rallier au mouvement de La Voie des indés, organisé par Libfly, un réseau social du livre indépendant.

    La Voie des indés 2014 Libfly

    Je ne jette pas la pierre sur la logique de groupe qui permet d’être plus puissant à plusieurs pour éditer de bons livres. Mais je défends l’édition indépendante à mon échelle, dont l’avenir est menacé.

    Je veux une littérature protéiforme, surprenante, diversifiée ; je veux une édition indépendante.

     

    Lybertaire

    « En crachant du haut des buildings ≡ Dan FanteVongozero ≡ Yana Vagner »
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  • Commentaires

    1
    Dimanche 24 Août 2014 à 19:16
    charlotte
    J'aime beaucoup ton point de vue. De mon côté, j'ai un attachement tout particulier pour les premiers romans qui ne bénéficient que rarement d'un super plan com', ces derniers étant réservés à des auteurs ultra connus qui n'en ont pas besoin. Cherchez l'erreur...
    2
    Dimanche 24 Août 2014 à 20:23

    Eh oui, pourquoi lancer plein de titres si finalement les maisons n'ont ni le temps ni le budget de tous les lancer ? Je regarde de temps en temps les statistiques des ventes et c'est pas terrible !

    3
    Mercredi 27 Août 2014 à 06:53
    sous les galets

    C'est une vraie question celle que tu poses. Il y a des éditeurs qui nous parlent de d'autres contrées '(je pense à Mirobole qui donne une belle visibilité aux littératures slaves et de l'est: hongrois, polonais etc...).

    Après moi, je suis quand même très attachées à certains auteurs des grandes maisons d'édition, que j'attends fébrilement. Et si comme toi, je trouve pathétique combien les blogs relaient les titres déjà médiatisés, je sais aussi qu'il y a beaucoup de romans très moyens voire mauvais parmi les 600 qui sortent. C'est donc très compliqué de faire le tri.

    Mais comme toi, je suis pour une littérature indépendante mais surtout pour une blogosphère plus transparente. 

    4
    Mercredi 27 Août 2014 à 16:21

    Tout à fait d'accord Galéa, effectivement les grands comme les petits savent publier de bons textes, même si le premier juge est le lecteur (et que tout est affaire de goût) ! Je partage aussi l'impression d'un grand ensemble de livres moyens, et c'est peut-être ce que l'on ressent quand on lit beaucoup, on devient plus exigent (?).

    Il faut dire aussi que les grandes maisons ont les moyens financiers de s'attacher les auteurs de talent par des droits d'auteur parfois alléchants, tandis que les petites maisons ne paient pas toujours leurs auteurs.

    Et c'est marrant que tu mentionnes Mirobole, car je vais justement recevoir un livre de cet éditeur pour l'opération La Voie des indés :D Je ne connaissais pas du tout cette maison, et la littérature de l'est m'intéresse en ce moment :)

    5
    Dimanche 7 Septembre 2014 à 23:28

    J'ai fait d'énormes découvertes avec Libfly dont celle des maisons d'éditions indépendantes, surtout Elyzad avec des livres d'une superbe qualité et de très très bons auteurs

     

    6
    Mercredi 1er Octobre 2014 à 16:55
    Alex-Mot-à-Mots

    Malheureusement aussi, les bons auteurs découverts dans des petits maisons d'édition rejoignent vite le grands groupes.

    7
    Mercredi 1er Octobre 2014 à 21:35

    C'est vrai qu'il y a un mouvement dans ce sens, mais pas mal d'auteurs ont un attachement avec leur éditeur, même petit, avec lequel ils ont une relation privilégiée depuis leurs débuts (relation qu'on ne retrouve pas toujours dans les plus grandes structures). Après, c'est aussi affaire de sous ;)

    8
    Vendredi 10 Octobre 2014 à 18:32

    Bonjour,

    Cela fait plaisir d'entendre des "grands lecteurs" prendre du recul par rapport aux grandes maisons d'édition qui -il faut le dire - se conduisent parfois comme les marques dominantes au détriment des petits concurrents.

    Vous l'aurez compris, je suis chez un petit éditeur (les éditions Hélène Jacob) que peut-être vous ne connaissez pas. J'en parle sur mon blog.

    Puis-je vous laisser mon site ? S'il vous reste encore du temps...

    Bravo pour votre énorme travail !

    Bien cordialement.

    Jean-Claude Thibault

    9
    Vendredi 10 Octobre 2014 à 18:57

    Libfly, La voie des Indés, les éditeurs m'ont encore apporté de très très belles lectures.


    J'ai découvert également Mirobole cette année...


    *J'arrête on va penser que je suis achetée, mais non, simplement heureuse de ces découvertes très très intéressantes

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    10
    Lundi 13 Octobre 2014 à 13:09

    > Bonjour Hesteve-Pamphile ! Merci pour votre commentaire, ça me fait très plaisir ! Je suis très sensible à la question de l'indépendance (financière, intellectuelle) qui influe forcément sur les goûts des lecteurs. Je ne connaissais pas cette maison en effet, mais je lis peu de romans policiers, et parfois des thrillers. C'est que ma pile à lire ne fait que s'allonger ;)

    > Zazy : J'ai aussi découvert Mirobole cette année, en plus une maison bordelaise ! Pour moi c'est pareil, on a nos maisons préférées et on a envie d'en parler :)

    11
    Vendredi 31 Octobre 2014 à 15:46

    Bonjour,

    Je ne voudrais pas être importun mais je n'écris pas que des romans policiers. Juste avant de connaître les éditions Hélène Jacob, j'ai fait paraître sur Amazon un roman satirique auquel je tiens beaucoup "Ô AUDIMAT..." (uniquement en ebook) si vous lisez en numérique... Je sens que je commence à éprouver une phobie pour les piles à lire : je sais, c'est détestable.

    J'espère ne pas vous avoir importunée.

    Bien cordialement.

    Jean-Claude Thibault

    12
    Marie
    Mercredi 15 Novembre 2017 à 15:17

    Bonjour 

    Je n'avais jamais réfléchi à la question de l'indépendance des maisons d'édition, même si j'en ai plus que marre de voir Gallimard partout. J'essaie surtout d'adopter un autre démarche en achetant d'occasion. Ca me permet de découvrir de nouveaux livres, de me laisser porter, sans avoir forcément de liste de livres. Je trouve que ton blog est génial.n-n Il nous fait nous interroger sur le monde qui nous entoure,  le passé, ce qu'on tente de nous faire oublier. C'est ce que je recherche ,en particulier, dans les romans graphiques et les bandes dessinées: une ouverture sur le monde, un questionnement et surtout une découverte. J'en viens à me demander si l'une des missions de la littérature n'est pas d'être une espèce de lanceuse d'alertes, de nous faire des piqûres de rappel, de nous faire ouvrir les yeux.  Je constate un monopole des maisons d'édition avec Gallimard, évidemment, mais aussi les grands groupes comme Hachette & co qui s'approprient le marché. Je suis foncièrement contre les monopoles, je fuis les grandes marques. Il me semble donc logique de faire la même chose avec les livres. Tenter de trouver des livres qui me correspondent dans des maisons d'édition indépendantes, trouver des alternatives. Si jamais tu as une liste de maisons d'édition indépendante, fais-moi signe (: . Je réfléchis aussi à l'eurocentrisme de la littérature, au fait que la littérature médiatisée, mondialisée est très occidentale qui méprise, par exemple, complètement les littératures asiatiques, africaines ou encore d'Amérique du Sud. Là encore, un gros travail est à faire en essayant de trouver, des listes qui fassent découvrir des auteurs-rices de tous les pays, afin que chaque territoire soit représenté.Ce n'est malheureusement pas gagné :c

     

    En tout cas, merci pour ton blog qui est une vraie pépite ! 

      • Mercredi 22 Novembre 2017 à 21:51

        Bonjour Marie,

        Merci beaucoup beaucoup pour ton commentaire qui me touche, car c'est bien pour ça que je continue l'aventure de Bibliolingus depuis presque six ans maintenant!!

        La question de l'indépendance est fondamentale partout, car elle conditionne la manière dont l'information, l'objet sont produits. Comme les autres secteurs, l'édition est concernée par la concentration verticale et horizontale, et pour cause! Avoir le pouvoir de la parole, des mots, c'est avoir le pouvoir tout court. J'aime beaucoup ce que tu dis, le fait de comparer la littérature à une lanceuse d'alerte. C'est une façon de dire qu'on peut être engagé par la littérature.

        J'achète peu d'occasion pour ma part, mais j'ai emprunté 95 % de mes lectures jusqu'à il y a peu (le pouvoir d'achat, toussa toussa). Sinon tu peux aussi acheter neuf mais en librairie indé, tant qu'à faire ;)

        Concernant les maisons d'édition indépendantes, je peux t'inviter à aller sur le site de Libfly, actuellement en pause certes, mais qui a pendant des années, chaque mois, mis en avant le catalogue d'une maison indé. En fonction de là où tu habites, il y a sûrement des salons de livres consacrés à l'édition indé!

        Concernant la littérature asiatique, je ne suis pas du tout spécialiste, mais je connais les éditions Philippe Picquier (Asie, Inde) bien sûr, mais aussi Decrescenzo éditeurs (Corée).

        Merci encore d'avoir pris le temps de m'écrire!! J'espère que tu trouveras des lectures épanouissantes et motivantes par ici :D

    13
    Marie
    Lundi 8 Janvier 2018 à 16:24

    Et je te souhaite encore longue route ! Ton blog me touche parce qu'il a un vrai parti pris, un engagement et, d'une certaine manière, témoigne d' un véritable investissement de soi. C'est très rare mais tellement précieux, de se battre pour des livres, de choisir de sortir des sentiers battus et de proposer des livres qui marquent, interrogent.

    Complètement. On se rend compte qu'on voit seulement par le petit bout de la lorgnette, qu'on est guidé-es voire conditionné-es pour voir tel pan plutôt qu'un autre. Un monopole, c'est le mot. On est dans un monopole où on doit être d'accord avec telle ligne éditoriale, parler de tel sujet et en occulter un autre. C'est tellement dangereux. Le problème ce n'est pas seulement qu'on lise de moins en moins ce qui est pose aussi question c'est également le contenu, le point de vue biaisé, marchand ou manipulateur. C'est affolant. On a une vision de la culture très édulcorée presque naive selon laquelle ce serait le dernier rempart, qu'elle résisterait encore aux pressions exercées de toutes parts (économiques, sociales, genrées etc). 

    Je réfléchis de plus en plus à ma consommation de livres, à ceux que je possède, que je souhaiterais avoir. Je m'aperçois que l'on cède beaucoup aux normes sociales, il faut avoir tel livre mais, au fond, est-ce qu'il me correspond ? Est-ce que je dois le lire parce qu'il est classique ou parce qu'il me plaît ? Je suis un peu chamboulée. Issue d'une formation littéraire, j'ai l'impression d'avoir toujours été conditionnée. D'ailleurs, ma liste de livres à vendre est tellement longue (plus de 80 livres) qu'elle est symptomatique de ce questionnement. Il me semble qu'on vit dans une société de l'apparence et qui est présente dès l'école où il faut lire tel classique. Bien sûr que certains classiques sont fondamentaux, éclairants mais est-ce à dire qu'il faut lire tout Molière, Maupassant ou Marivaux ? Faut-il se réduire à de tels noms? Ne peut-on pas faire découvrir des autrices, des littératures étrangères ? Tu l'auras compris, je suis presque dans une crise littéraire. Aussi je n'achète plus de livres et préfère me concentrer sur ce que j'ai, étudier les raisons pour lesquelles je les ai acheté.

    J'irai voir, merci (: . En effet, quitte à racheter un jour des livres autant se tourner vers les indé.

     

    Je t'en prie, je suis vraiment ravie d'avoir découvert ce blog !

     

    Merci à toi (:

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